COURS : EVALUATION DE L'ENTREPRISE (Introduction à l'ingenierie financière)
L’ingénierie
financière est un ensemble de techniques permettant à des dirigeants de
structurer ou de restructurer le financement de leur entreprise, d’accompagner
son développement à travers des opérations de (dé) croissance externe, de la
transmettre dans des conditions satisfaisantes. L’ingénierie financière permet
à des investisseurs de (1) prendre le contrôle d’entreprises saines tout
en minimisant momentanément leur apport, (2) révolutionner le gouvernement et le
projet économique d’entreprises en difficulté afin d’asseoir un nouveau
pouvoir, tout en restaurant une situation financière à travers sa restructuration.
L’ingénierie
financière permet à des actionnaires dominants d’organiser le contrôle
de l’entreprise, de faire appel à des capitaux extérieurs sans perdre le
contrôle, de transférer momentanément le contrôle tout en détenant une option
d’achat sur une fraction du capital à terme ouvrant le droit au contrôle à
terme.
Pour ce faire,
l’ingénierie financière s’appuie sur un ensemble de leviers :
le levier
juridique ;
le levier
financier ;
le levier
fiscal
le levier
social
Le levier juridique consiste à
minimiser la mise de fonds d’un investisseur tout en asseyant le contrôle d’un
groupe par une société holding. Il est accentué par l’émission d’actions
à droit de vote double, la cession d’actifs sans droit de vote ou
à dividende prioritaire.
Le levier financier repose sur
l’utilisation de l’endettement pour accroître la rentabilité financière,
l'utilisation de l’endettement comme substitut aux capitaux propres pour
stabiliser la structure du capital et du contrôle.
Le levier fiscal renvoie à des
réductions d’impôt dont bénéficie un montage, à travers par exemple, le régime
« mère-fille » et l’intégration fiscale.
Le levier social concerne
l’instauration de méthodes d’intéressement visant à motiver les partenaires en
les associant au moyen de Stocks options, d’intéressement, de versement volontaire
aux salariés et de participation (PEE, FCPE, FCPR).
La première étape de
toute démarche d’ingénierie financière consiste à l’analyse financière préalable
à une évaluation de l’entreprise cible. Aussi, notre présentation s’articulera
autour des principales méthodes d’évaluation de l’entreprise (Section : I)
avant d’aborder les leviers juridiques et financiers de l’ingénierie financière
(Section : II).L’ÉVALUATION D’ENTREPRISE
L'évaluation
d'entreprise est l'estimation, à partir de critères qui se veulent objectifs,
de sa valeur.
Dans une
démarche d’évaluation d’entreprise, le diagnostic financier permet de porter
une appréciation quant à la santé financière d’une entreprise par l’étude de sa
situation patrimoniale et de son équilibre financier, par l’analyse des résultats
et de la rentabilité, et enfin par l’analyse de la capacité d’autofinancement
par rapport à l’enveloppe globale du projet. L’analyse de cette situation peut
faire ressortir la nécessité pour l’acquéreur potentiel d’injecter des fonds
dans l’entreprise pour retrouver un équilibre financier «normal». Ces fonds
viendraient s’ajouter à ceux dont les besoins auraient été mis en évidence au
travers des autres diagnostics de l’entreprise, décrits ci-dessus, et ce, dans
le contexte propre de l’entreprise sans empiéter sur les besoins liés à un
développement du fait de l’acquéreur.
Les méthodes
d'évaluation d'entreprise sont nombreuses et variées. Par conséquent, il est intéressant
de comparer les différentes valeurs obtenues pour avoir une vue d'ensemble de l'entreprise
étudiée. On peut alors en tirer un intervalle de valeurs issu des différentes méthodes
d'évaluation. Cette mise en perspective doit permettre de retenir ou d'écarter
les différentes méthodes d'évaluation.
La première
méthode d’évaluation de l’entreprise, l’actualisation des flux de trésorerie
disponible, désignée sous le terme de Discounted Cash Flow (DCF),
est fondée sur l’idée que la valeur de l’actif économique est égale au
montant des flux de trésorerie disponibles futurs de l’entreprise actualisés
en fonction de son risque. Elle traduit financièrement l’idée selon laquelle
l’entreprise vaut ce qu’elle rapporte.
Le taux
d’actualisation utilisé est le coût moyen pondéré du capital. On calcule ainsi
:
- les flux de
trésorerie disponibles actualisés sur l’horizon des prévisions explicite
(visibilité de l’entreprise) ;
- la valeur
terminale actualisée à partir de l’estimation d’un taux de croissance à l’infini
;
- la valeur des
capitaux propres, qui est la différence entre la valeur de l’actif économique ainsi
obtenue et la valeur de la dette bancaire et financière nette et éventuellement
d’autres éléments.
La deuxième
famille de méthodes d’évaluation les plus usuellement utilisées est l’approche patrimoniale
qui part du principe que l’entreprise vaut ce qu’elle possède.
L’évaluation selon la méthode patrimoniale revient à estimer séparément les
différents actifs, divisions ou filiales de l’entreprise, et à en soustraire la
valeur de l’endettement net.
Il existe
plusieurs types de valeurs patrimoniales (depuis la valeur de liquidation
jusqu’à la valeur d’usage) et la fiscalité n’est pas neutre (impôt sur les plus
ou moins-values). La valeur patrimoniale n’a de sens que si elle intègre les
actifs incorporels de l’entreprise (marque, clientèle…), qui sont
particulièrement difficiles à estimer.
La troisième
méthode d’évaluation, la méthode des multiples, est une approche analogique par
comparaison avec d’autres entreprises du même secteur. Dans cette approche, la
valeur de l’actif économique d’une entreprise résulte d’un multiple de sa
capacité bénéficiaire : multiple
du résultat
d’exploitation ou multiple de l’excédent brut d’exploitation. Le multiple
considéré peut être un multiple de transaction ou un multiple boursier. Il
provient de l’observation de la valorisation
d’entreprises semblables. Pour obtenir la valeur des capitaux propres, on retranche
la valeur de l’endettement bancaire et financier net et éventuellement d’autres
éléments. Alternativement, on valorisera directement les capitaux propres par
un multiple comme le PER, le PBR ou le multiple du cash flow.
Il est
indispensable d’expliquer les écarts obtenus entre ces différentes méthodes qui
sont souvent une source considérable d’ingénierie financière et qui évoluent
tout au long du cycle de vie de l’entreprise.
Pour un
financier, le marché des entreprises et de leur contrôle n’est qu’un
compartiment du marché des capitaux. Il n’existe donc pas de véritable valeur
de contrôle autre que la valeur stratégique liée à l’existence de synergies
industrielles.
Du fait des
synergies industrielles, la valeur stratégique d’une entreprise est
généralement supérieure à sa valeur financière, souvent appelée valeur stand-alone.
Toute la négociation consistera donc à partager ce surcroît de valeur entre
l’acheteur et le vendeur. Chacun d’entre eux s’efforçant bien entendu d’en
obtenir la plus grande part.
L’actualisation des flux de trésorerie (Discounted Cash Flow, DCF) ou Cash Flow Disponible, CFD).
1.1.
Principes généraux
La méthode des
flux futurs de trésorerie ou Discounted Cash Flow (DCF) consiste à
calculer, par actualisation, la valeur actuelle nette des flux de trésorerie
futurs attendus d’une activité.
On peut
décomposer la mise en oeuvre d’une évaluation par la méthode du DCF en quatre phases
qui, sans être totalement indépendantes, correspondent aux éléments les plus importants
du modèle.
Ces étapes sont les suivantes :
1. modéliser les flux de
trésorerie attendus;
2. estimer le flux
normatif;
3. calculer le coût moyen
pondéré du capital;
4. déterminer la valeur
d’entreprise.
· Modéliser les flux de trésorerie attendus
Les éléments
réunis lors du diagnostic stratégique et financier constituent, avec le
business plan (prévisions d’activité) établi par la société, le point de départ
d’une évaluation selon la méthode du DCF. Lorsqu’elles sont disponibles, ces
prévisions sont souvent établies sur un horizon relativement court (de 3 à 5
ans).
Le rôle de
l’évaluateur est d’examiner ces prévisions, afin de les critiquer ou de les
prolonger si nécessaire. Dans certains cas, il pourra même être amené à établir
ou à assister les dirigeants dans l’établissement de ces prévisions. L’objectif
recherché, dans cette première étape, est de disposer d’un modèle exempt
d’erreurs matérielles et reflétant des hypothèses d’activité réalistes,
cohérentes et pertinentes.
Estimer le flux normatif
Après avoir
examiné les prévisions établies à 3 ou 5 ans, l’évaluateur doit estimer la performance
financière que la cible est en mesure de maintenir à long terme.
Ce flux de
trésorerie «normatif» va en effet permettre le calcul de la valeur terminale,
qui correspond à la valeur de l’actif économique de la cible à la fin de
l’horizon de prévision explicite.
Il est important de souligner que la valeur
terminale représente très souvent une part prépondérante (plus des 2/3) de la
valeur d’entreprise. Cette proportion élevée s’explique par le fait que les
prévisions sont établies sur un horizon relativement court par rapport à la
durée de vie des actifs et que les prévisions intègrent leur renouvellement via
les investissements.
Le calcul du
flux normatif se base en général sur le dernier cash flow des prévisions,
corrigé, dans le cas d’une société industrielle, des éléments suivants :
la croissance
du chiffre d’affaires doit être égale à la croissance qu’il est possible de maintenir
à long terme. Souvent, on retiendra le même rythme que l’économie, soit environ
2 à 3 % selon le secteur;
le taux de
marge doit tenir compte des éléments du diagnostic stratégique (arrivée éventuelle
d’un concurrent, dérégulation...) ;
la variation
de BFR doit être calculée en tenant compte du taux de croissance à long terme;
les investissements doivent être calculés afin de maintenir le ratio
d’intensité capitalistique (actif immobilisé/chiffre d’affaires) à un niveau
cohérent avec celui constaté lors du diagnostic financier ou sur les principaux
concurrents ;
les
amortissements sont fixés comme étant égaux aux investissements, afin de permettre
le calcul de l’impôt sur les sociétés normatif ;
les différents
retraitements peuvent conduire à un cash flow normatif sensiblement différent
du dernier cash flow, notamment lorsque le dernier cash flow a été déterminé en
tenant compte d’une croissance forte et d’investissements importants.
1.2.
Flux revenant aux apporteurs de fonds VS flux
revenant aux actionnaires ...
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